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7 mai 2008 3 07 /05 /mai /2008 17:45

Deux lignes traversent l'univers de Buffy : d'une part une séparation entre Bien et Mal, d'autre part celle entre Réel et Imaginaire. La première, on l'a déjà dit, est extrêmement poreuse et les personnages ne cessent de la franchir dans un sens où l'autre. Très vite d'ailleurs le statut de protectrice du Bien de Buffy sera mis en cause par sa relation amoureuse avec le vampire Angel qu'elle est censée combattre.


La seconde est vraiment celle qui fait de Buffy une oeuvre à part dans le domaine des superhéros et du merveilleux. En effet, si la série se plaît à mêler dans sa narration l'épopée chevaleresque de l'héroïne et son quotidien le plus banal, elle cultive entre ces deux sphères une limite extrêmement forte. C'est dans le cadre de la mort que cette limite est particulièrement visible : si la Tueuse ne cesse de massacrer toutes sortes de monstres et de démons, il lui est strictement interdit de tuer des humains, pour aussi nuisibles que soient ces derniers. Par ailleurs, les personnages qui meurent dans le cadre de la magie et de l'épopée peuvent ressuciter, pas ceux qui meurent comme des humains "normaux". Le jeu entre ces deux lignes va constituer le coeur de la série, les humains basculant du côté maléfique comme Faith ou Warren lorsqu'ils oublient de distinguer l'imaginaire de la vie réelle, et qu'ils se laissent entraîner par leurs désirs et leurs fantasmes. Buffy elle-même menace plusieurs fois de franchir cette ligne, notamment lorsque dans la saison 2 elle s'emporte contre l'amant de sa mère.


Aussi la série parle sans doute moins du Mal que de son Imaginaire : la Buffy des débuts, jolie blonde avec sa petite croix, protégeant les jeunes gens innocents de ces monstrueux prédateurs sexuels que sont les vampires, est la parfaite incarnation des valeurs puritaines (sur un ton évidemment très parodique). Elle se détache progressivement de ce cadre rigide, notamment dans la saison 4 où elle doit protéger cet univers démoniaque face à une organisation gouvernementale qui menace de l'anéantir, jusqu'à devenir dans la saison 6, elle-même une sorte de démon. L'entrée de Buffy dans l'âge adulte, consistera essentiellement à accepter le Mal comme partie intégrante de la vie et non plus seulement comme un absolu clairement identifiable qu'on peut rejeter.


La série apparaît ainsi comme la critique à la fois d'un certain imaginaire, celui de la religion qui a contaminé le genre fantastique, mais également de la tendance qu'a l'Amérique à confondre l'imaginaire et le réel. D'où le combat dans la saison 7, contre le prêtre Caleb, image d'une société réactionnaire étroitement accrochée à ses valeurs religieuses dépassées.


Diffusée en pleine lutte contre l'
Axe du Mal (la saison 6, la plus sombre, correspondant ainsi au deuil des événements du 11 septembre) Buffy trouve donc une résonance bien plus politique qu'il n'y paraît.

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